Notre première approche d’une représentation de nombres s’est donc faite autour du nombre cent. Outre qu’il symbolise le « CENT » rue de Charenton, ce nombre est pratique pour plusieurs raisons. D’abord il peut être considéré comme un module (100, centaines, milliers, etc.), ce qui permet une exploitation graphique et perceptive plus aisée (pour la suite).
Il est avéré que selon la variabilité des paramètres de représentation (taille, disposition spatiale, formes, couleurs, etc.), la perception du nombre cent est « vécue » différemment par l’observateur.
Lors de la dernière réunion du groupe, j’avais soumis une vingtaine de planches représentant toutes cent éléments (clause non dévoilée), à raison de 20 sec chacune, successivement, en demandant d’écrire le nombre perçu (sachant fort bien que 20 sec n’était pas suffisantes pour pouvoir compter les éléments). L’écart de perception va de « 84 » à « 115 » (!)
Ce qui avoisine 100, et montre que le cerveau se laisse facilement berner. Mais comme les participants étaient au fait qu’on travaillait « autour du nombre cent », cette information les a influencés (ils se doutaient bien qu’on était très proche de cent, voire que c’était un « piège » et que, peut-être, toutes les planches comptaient cent éléments…)
J’ai donc refait l’expérience avec une dizaine de personnes totalement neutres, pas au courant du tout du « travail sur le nombre cent », et là l’écart s’agrandit : de « 75 » à « environ 200 » (pour des planches représentant toujours cent éléments chacune).
Il n’y a qu’une approche scientifique, avec une méthodologie précise, analytique, mettant en oeuvre des outils de mesure ad’hoc, qui permettrait de tirer des conclusions réellement significatives. Outre qu’il faudrait pouvoir disposer d’un panel de « testeurs » plus important. Seul un laboratoire étudiant la physiologie de la perception pourrait être à même de délivrer des clés fiables, reproductibles.
Disons qu’intuitivement, on peut néanmoins tirer quelques enseignements de cette première phase « sensible », en se fiant au « ressenti » commun. Par exemple que :
Le nuage de points est plus difficile à appréhender que la grille ou les groupes.
La distribution aléatoire sur l’ensemble de la surface génère une impression quantitative plus importante qu’une distribution « éloignée » – qui laisse beaucoup de vide.
En revanche, la diminution de la taille des points n’entraîne pas de perception numérique sensiblement différente.
Le cerveau tend à chercher des « régularités » et des « similitudes » pour essayer de compter, ainsi les grilles (et leurs dérivés) donnent-elles les meilleurs résultats pour l’appréhension du nombre (par calcul mental facilité)
Les objets a forte charge sémantique individuelle tendent à minimiser la quantité perçue.
… d’autant plus quand le groupe définit une image sous-jacente claire.
La perception de premier niveau (une image qui s’impose et qui a un sens) influe considérablement sur l’effort perceptif nécessaire au dénombrement.
De façon générale, toute disposition représentant une image tend à rendre plus difficile la perception du nombre au profit de l’émotion due à l’image. Comme si cette image parasitait ou « vampirisait » la perception du dénombrement.
Par ailleurs, une image de fond – voire une simple couleur –, tend à ajouter, par association d’idée, une dimension cognitive à la représentation des éléments.
Suite des images bientôt, en pdf téléchargeable.